A66 - Les chasseurs de Dieu.

Article du Pasteur Bill Randles. Publié par Christian Witness Ministries.

L'original anglais de cet article peut être consulté à l'adresse suivante :

http://www.christian-witness.org/archives/van2000/chaseGod.html

Reproduction autorisée, à condition qu'elle soit intégrale.

 

Note de l'Editeur : Cet article analyse le livre de Tommy Tenney, intitulé "Les chasseurs de Dieu." Ce livre vient d'être publié en français. Toutefois, toutes les citations sont traduites d'après le texte de l'article, et non extraites de la traduction française. Les numéros de pages correspondent au texte de l'édition américaine.

 

 

Tommy Tenney est un pasteur issu de trois générations de pasteurs de l'Eglise Pentecôtiste Unifiée. Il se définit lui-même comme un "chasseur de Dieu," comme un nombre croissant de ses partisans. Il est l'auteur d'un best seller intitulé "Les chasseurs de Dieu." Il a exercé un ministère pastoral pendant dix ans, et a passé ensuite dix-sept ans en tant que "revivaliste." Selon la jaquette publicitaire de la quatrième page de couverture de son livre, il a été utilisé à la fois pour "allumer et alimenter le feu du réveil." Elle affirme également que bien qu'il ait expérimenté la puissance miraculeuse de Dieu, il apprécie surtout la valeur de l'humilité et de l'intimité avec Dieu.

Ce livre est un appel pour tous ceux qui reconnaissent avoir faim de la présence manifestée de Dieu. Il commence par un récit qui devrait toucher une corde sensible chez tous ceux qui ont été radicalisés par une spiritualité fondée sur des expériences, à la Toronto ou à la Pensacola. Dans le chapitre intitulé : "Le jour où je L'ai presque touché" (il s'agit de Dieu), Tenney décrit une réunion qu'il animait à Houston, au Texas. Le pasteur qui l'avait invité venait de lire le passage de 2 Chroniques 7:14, et avait exhorté l'auditoire à "chercher la face de Dieu, au lieu de se contenter de voir sa main agir." Soudain, il se fit entendre un violent coup de tonnerre, et le pupitre se fendit en deux ! Puis les manifestations habituelles du "fleuve de réveil" éclatèrent dans toute l'assemblée. Partout les gens se mirent à tomber et à crier. De nombreux hommes d'affaires s'entassèrent même comme des piles de fagots ! "Des hommes d'affaires enlevèrent leurs cravates. Ils s'empilèrent littéralement les uns sur les autres, dans le bruit le plus horriblement harmonieux de repentance que vous ayez jamais pu entendre."

Selon son propre aveu, Tenney n'avait été jusque-là qu'un revivaliste professionnel. "Nous avons parlé, prêché et enseigné sur le réveil, au point que l'Eglise est maintenant écœurée de l'entendre. J'en avais fait mon métier. J'ai prêché les réveils. Du moins le croyais-je. Puis Dieu a brisé la boîte où Il était enfermé, détruisant tout ce que nous avions construit, lorsqu'Il S'est manifesté."

Tenney fait écho à une ancienne prophétie donnée par John Wimber, à présent disparu, qui avait dit : "Dieu revient prendre possession de Son Eglise." Mais il pose comme principe que la seule chose qui empêche Dieu de "reprendre possession de Son Eglise" est le manque de faim spirituelle. Tenney, comme d'autres, semble interpréter cette faim comme étant la faim de la "présence manifestée de Dieu." C'est la raison pour laquelle son livre s'adresse d'abord à tous ceux qui sont "fatigués de distribuer des traités, de frapper aux portes, et d'essayer de faire bouger les choses… Cela fait longtemps que nous essayons de faire bouger les choses. A présent, c'est Dieu qui veut les faire bouger !" (page 12).

Selon Tenney, une partie du problème est due au fait que trop de Chrétiens "campent sur quelque vérité poussiéreuse que tout le monde connaît." Voilà le problème ! Une "vérité poussiéreuse" ! Bien entendu, Tenney veut nous conduire et nous guider vers l'autre élément de l'alternative, qu'il appelle la révélation.

"La différence entre la vérité de Dieu et la révélation est très simple. La vérité, c'est là où Dieu Se tenait autrefois. La révélation, c'est là où Il Se tient aujourd'hui. La vérité est la piste de Dieu. C'est Son sentier, Son chemin. Où ce chemin mène-t-il ? Il mène à Dieu Lui-même ! Il se peut que des quantités de gens soient heureux de savoir où Dieu Se tenait. Mais les vrais chasseurs de Dieu ne se contentent pas de suivre Dieu à la trace et de connaître Ses vérités. Ils veulent Le connaître Lui. Ils veulent savoir où Il est et ce qu'Il fait aujourd'hui… Il y a une grande différence entre la vérité présente et la vérité passée. Je crains que l'Eglise se soit en grande partie contentée d'étudier la vérité passée, et que très peu de ce que nous savons constitue la vérité présente." (Extrait de l'introduction). Cet appel de Tenney à abandonner la "vérité passée," en faveur d'une "vérité présente" plus pertinente, est loin d'être original. Il n'est que le dernier d'une longue liste d'enseignants qui ont exploité l'insatisfaction de nombreux Chrétiens dans ce monde tourné vers le divertissement. Ils n'ont fait que subtilement dénigrer la saine doctrine de la Parole de Dieu, afin de promouvoir les toutes dernières manifestations d'une religion fondée sur l'expérience. Suivant l'exemple des enfants d'Israël, fatigués de la manne, ces modernes enfants de Dieu ne "supportent plus la saine doctrine." Tenney, comme tant d'autres aujourd'hui, ridiculise facilement l'enseignement et l'étude de la Bible, comme s'il s'agissait d'activités aussi déplacées qu'une partie de "Trivial Poursuite."

"Il n'est tout simplement pas suffisant d'avoir entendu parler de Dieu. Nos églises sont remplies de gens qui sont capables de gagner des concours bibliques, mais qui ne connaissent pas Dieu" (page 3).

Voilà pour tous ces Chrétiens enlisés dans leur "vérité poussiéreuse" et passionnés par les sentiers de Dieu. Mais qu'en est-il des adeptes du Nouvel Age et des occultistes ? Tenney est convaincu qu'ils sont animés par les motivations les plus pures. "Ne me dites pas qu'ils ne sont pas affamés de Dieu, quand on les voit porter leur verroterie à leur cou, dépenser des centaines de dollars par jour pour écouter des gourous, ou payer des milliards de dollars chaque année à des médiums !" (page 2).

Bien entendu, l'unique obstacle que rencontrent tous ces chercheurs au cœur pur n'est autre que l'Eglise ! Je croyais pour ma part que c'était le fait que "nul ne cherche Dieu," et que ces occultistes, ces sorciers, et tous ceux qui consultent les voyants, sont en rébellion contre Dieu.

"Ils ont faim d'entendre quelque chose qui les dépasse, quelque chose qu'ils n'entendent pas dans l'Eglise actuelle. Le problème, c'est que les gens sont malades de l'Eglise, parce que l'Eglise offre bien moins que le Livre qu'elle proclame" (page 3).

"Naomi et sa famille ont quelque chose en commun avec ceux qui sortent des églises aujourd'hui ou qui les évitent complètement : ils ont quitté "cet endroit" et sont allés quelque part ailleurs pour y trouver du pain. Je peux vous dire pourquoi les gens vont remplir les bars et les boîtes, et vont consulter les médiums par millions. Ils s'efforcent simplement de vivre et de survivre, parce que l'Eglise a failli dans sa mission. Ils ont cherché, ou leurs parents et amis ont cherché et leur ont raconté, mais le placard spirituel était vide" (pages 19-20).

C'est donc l'Eglise qui force tous ceux qui cherchent honnêtement Dieu à remplir les bars et les boîtes ? Pourtant, la Bible n'affirme-t-elle pas : "Ils sont donc inexcusables, puisque, ayant connu Dieu, ils ne l'ont point glorifié comme Dieu, et ils ne lui ont point rendu grâces" ? (Romains 1:21). Tenney n'est pas de cet avis, puisque, selon lui, ces occultistes et sorciers au grand cœur sont bien allés dans l'Eglise, mais n'y ont rien trouvé. Ils n'avaient donc d'autre choix que de se plonger dans l'occultisme ! Ce genre d'accusation trouvera toujours des oreilles attentives dans notre monde actuel de "chercheurs sensibles" et mécontents. Il faut bien qu'ils trouvent un bouc émissaire pour leur mécontentement. La faute est à l'Eglise !

A l'exposé des diverses expériences personnelles racontées par Tenney, et de ses tentatives de stimuler l'appétit spirituel de ses lecteurs, on peut avoir un aperçu de la théologie de l'auteur. Nous l'avons déjà dit, Tenney défend une curieuse conception de la Parole de Dieu, qui est pour lui "le chemin de Dieu," "l'endroit où Dieu Se trouvait," la "vérité passée." C'est intéressant, certes, mais insuffisant pour les chasseurs de Dieu. Tenney dénigre en permanence la Parole de Dieu et tous ceux qui insistent sur la nécessité de mesurer toutes choses à sa lumière. Mais il le fait d'une manière très inhabituelle et assez innovatrice. Il compare l'Ecriture à des "vieilles lettres d'amour," tout en leur rendant quelque peu hommage, mais en leur niant toute pertinence pour une application à notre existence actuelle.

Je crains que nous n'ayons assouvi notre faim de Dieu en lisant les vieilles lettres d'amour qu'Il a écrites aux églises, dans les épîtres du Nouveau Testament. Elles sont bonnes, saintes et nécessaires, mais nous ne connaissons jamais Son intimité…" (page 15).

Tenney concède généreusement que les Ecritures sont "bonnes, saintes et nécessaires, mais…" Il y a un monde de significations dans ce "mais," car en reléguant l'Ecriture au statut de "vieilles lettres d'amour," il les rend inadéquates pour nous conduire actuellement dans une réelle intimité avec Dieu ! Pouvez-vous imaginer l'apôtre Paul reléguant l'Ecriture au statut de "vieilles lettres d'amour" ? Jésus n'a jamais opposé l'Ecriture à "l'intimité et la puissance avec Dieu." En fait, il les a mis sur le même plan ! "Jésus leur répondit : Vous êtes dans l'erreur, parce que vous ne comprenez ni les Ecritures, ni la puissance de Dieu" (Matthieu 22:29).

Le fait de connaître et d'aimer l'Ecriture est l'unique moyen de commencer à avoir une intimité avec Dieu, et ne représente jamais un obstacle à cette intimité ! Bien sûr, il y a le problème de ceux "qui écoutent la Parole, et qui ne la mettent pas en pratique." Mais la solution n'est pas de comparer les Ecritures à de "vieilles lettres d'amour," ni, pire encore, de reléguer la connaissance de la Bible à la capacité de "gagner un concours biblique" ! Que veut donc promouvoir Tenney ? Nous pouvons peut-être trouver une réponse dans le trésor si souvent cité de la sagesse charismatique :

"Un homme d'expérience n'est jamais à la merci d'un homme qui ne sait qu'argumenter… Si nous pouvons conduire les gens dans la présence manifestée de Dieu, tous les châteaux de cartes théologiques s'écrouleront" (page 20).

Cette affirmation, à quelques variations près, sous-tend tout le mouvement de réveil actuel : l'expérience prend le pas sur la doctrine, et la Parole de Dieu ne suffit pas à elle seule pour établir une relation avec Dieu. Les apôtres partageaient-ils cette croyance ? Ont-ils jamais "fendu en deux" des pupitres ? Opposaient-ils constamment la vérité et l'intimité avec Dieu ? Pierre a pourtant fait l'ultime expérience sensible. Il a vu Jésus transfiguré ! Mais plutôt que d'opposer cette expérience vécue sur la montagne sainte à la situation de ceux qui sont enfoncés dans "quelque vérité poussiéreuse," Pierre nous recommande de tenir "pour d'autant plus certaine la parole prophétique, à laquelle vous faites bien de prêter attention" (2 Pierre 1:19). Pierre n'a jamais conduit de "réveil du rire." Paul ne s'est jamais considéré comme étant le "barman de Dieu." Jacques n'a jamais éprouvé le besoin de placer des miches de pain sur l'estrade pour qu'elles soient "imbibées de l'onction" !

En outre, les apôtres n'ont jamais mené le genre de combat spirituel dont Tenney et d'autres assurent la promotion, au cri de : "Conquérons les villes pour Dieu !" "Je cherche des villes… Un jour, je prêchais dans une conférence à Portland, dans l'Oregon. J'ai entendu Frank Damazio mentionner quelque chose qui a retenu mon attention. Il a dit qu'un certain nombre de pasteurs de la région de Portland s'étaient réunis pour planter des piquets dans le sol, à des endroits stratégiques de tout le périmètre de leur région, dans la ville, et à tous les croisements importants. Cela leur a pris des heures, parce qu'ils priaient aussi sur ces piquets, qu'ils considéraient comme des symboles physiques marquant une déclaration spirituelle et constituant comme une ligne de démarcation. J'ai senti le Saint-Esprit vibrer en moi, et j'ai dit : "Frank, si tu me fournis les piquets, j'irai dans les villes vers lesquelles je me sentirai appelé, et j'aiderai les pasteurs à marquer leur territoire pour Dieu !"" (pages 102-103).

Est-ce une nouvelle manifestation de Toronto ou de Pensacola ? Je crois que Tenney et moi ne serions pas d'accord ! Je dirais que cette "intimité" tant désirée est de la même nature que cette "présence" recherchée par tous les pèlerins qui se rendent à Toronto ou à Pensacola. A la page 21 de son livre, Tenney semble suggérer que ces réveils représentent quelque chose de moins grand que ce qu'il propose.

"Les gens ne ressentent pas la présence de Dieu dans nos réunions, parce qu'elle n'est pas d'une intensité suffisante pour être mesurée sur nos instruments… Quand les gens reçoivent juste une petite touche de Dieu, mélangée à toutes sortes de choses qui ne viennent pas de Dieu, cela ne les encourage pas à aller plus loin. S'ils n'ont ressenti que des miettes de la présence de Dieu, tout en disant : "Oui, Dieu était réellement là," ils ajoutent : "J'y ai été, j'ai fait ceci et cela, j'ai acheté le T-shirt, mais je n'ai pas trouvé Dieu. Cela ne marche pas pour moi." Le problème, c'est que Dieu était bien présent, mais que Sa présence n'était pas assez manifestée. Ils ne L'ont pas rencontré comme Paul sur le chemin de Damas. Ils n'ont pas ressenti Sa présence manifestée d'une manière indéniable et irrésistible."

Sans le réaliser, il se peut que Tenney ait révélé quelque chose d'important. Il reconnaît que les réveils modernes, fondés sur les expériences, malgré leurs rencontres sensuelles avec la "présence," tendent finalement à cette attitude qui consiste à dire : "J'y ai été, j'ai fait ceci et cela…" Cela revient à faire des expériences mystiques répétées, qui deviennent de moins en moins intéressantes à mesure qu'on les fait. Mais, selon Tenney, la réponse consiste à rechercher de plus en plus d'expériences. Toronto et Pensacola n'ont offert que des miettes. On peut en obtenir davantage, sous une forme plus pure. Rodney Howard Browne a offert "un nouvel attouchement de Dieu" à ceux qui étaient fatigués d'une religion morte. Il leur a donné à boire du "vin nouveau." Ensuite Toronto est venu, et a offert à ces mêmes personnes une occasion de "s'imbiber" de l'onction de Dieu. Puis Pensacola a offert à son tour une touche de réveil encore plus pure que celui de Toronto, en mettant plus d'accent sur la repentance. Mais, en dépit des dénégations, le réveil de Pensacola découle directement de celui de Toronto. Steve Hill l'a importé de l'Eglise de la Sainte Trinité de Brompton, qui était l'église anglaise la plus engagée dans la bénédiction de Toronto.

Pour Tenney, tout cela ne représente que des miettes. Que nous offre-t-il ? Encore plus de Dieu ? Mais il s'agit toujours des mêmes prétentions, des mêmes clichés, des mêmes critiques de la doctrine, et, bien souvent, des mêmes dénigrements de la Parole de Dieu. Je vous prédis qu'il en sera de même que pour les "vagues" précédentes : cela laissera les foules encore plus vides que ce qu'elles étaient auparavant. Hélas, cela ne fera que les ouvrir à une nouvelle incursion dans une religion mystique fondée sur l'expérience.

Le christianisme orthodoxe a considéré comme valable une véritable faim de Dieu, en affirmant qu'on peut valablement l'assouvir en Le cherchant, dans le jeûne et la prière, dans une obéissance renouvelée à Sa volonté, et en revenant au point où nous avions abandonné le Seigneur. Les signes et les prodiges ne sont pas Dieu, et ne satisfont pas pleinement. Même des signes fantastiques comme des pupitres qui se fendent en deux, des foules qui tombent "sous l'onction de l'Esprit," ou des quantités d'hommes d'affaires s'empilant "comme des fagots" n'ont pas nécessairement grand-chose à voir avec une véritable faim de Dieu.

Finalement, cette faim évoquée par "Les chasseurs de Dieu" ressemble-t-elle vraiment à la faim dont ont parlé des hommes comme Tozer, Spurgeon, Wesley, Watchman Nee, ou d'autres géants de la foi des temps passés ? Jugez-en vous-même ! Mais si vous pensez qu'il pourrait s'agir d'une autre faim qu'une véritable faim de Dieu, il vous suffit de vous reporter à la dernière page de ce livre. Vous y trouverez une pleine page de publicité pour toute la panoplie de "vrai chasseur de Dieu" : le chapeau du "chasseur de Dieu," le T-shirt du "chasseur de Dieu," disponible en quatre tailles, et même la plaque minéralogique du "chasseur de Dieu" !